Au conseil de Métropole, la polémique se poursuit autour de « l’incinérateur à plastiques »

HERAULT TRIBUNE / 3 JUIN 2025

Garlonn Gaud

Coût, santé, dépendance industrielle : la transformation d’Amétyst en unité de combustion CSR divise la Métropole. Consultés, les citoyens n’ont pas pu se prononcer faute d’informations jugées suffisantes. Les élus devront trancher en juillet.
François Vasquez a été vif lors de sa prise de parole pour s'opposer au CSR ©copie d'écran Conseil de Métropole
François Vasquez a été vif lors de sa prise de parole pour s’opposer au CSR ©copie d’écran Conseil de Métropole

“La gestion des déchets sur la Métropole de Montpellier est un fiasco. Il faut s’en saisir”. Voilà ce que le vice-président en charge de la valorisation et du tri des déchets, René Revol, a déclaré lors du conseil métropolitain de ce 3 juin 2025. Au cœur des débats, l’évolution d’Amétyst en unité CSR, une chaudière à Combustibles Solides de Récupération, dont l’implantation dans le quartier Garosud de Montpellier a fait l’objet d’un dialogue citoyen. Leur bilan a été présenté ce jour dans l’hémicycle et a largement fait débat.

Un CSR, c’est quoi ? Il s’agit d’une chaufferie qui produit de la chaleur en brûlant des déchets triés non recyclables, contrairement à un incinérateur qui traite des déchets en vrac. Elle utilise principalement des résidus à fort pouvoir calorifique, comme certains plastiques, mousses, polystyrène ou fragments de bois, qui ne peuvent plus être valorisés autrement. “C’est un incinérateur à plastiques”, selon François Vasquez, conseiller à la Métropole qui avait été démis de sa fonction de vice-président chargé du tri des déchets justement à cause de ses prises de position sur ce dossier pour le moins brûlant. 

“C’est une énergie sale et fossile qui en plus est très chère”

L’écologiste est formel : le CSR ne nous permettra “en rien de réduire l’exportation de nos déchets”. De plus, c’est “présenté comme une énergie renouvelable mais c’est un mensonge pur et simple. S’il n’y a plus de pétrole, il n’y a plus de plastique et donc plus de CSR. C’est une énergie sale et fossile qui en plus est très chère”. Celui qui “travaille depuis 20 ans sur les déchets” prend l’exemple de Besançon. 

La ville “a refusé la mise en place de ce type d’incinérateur. En 2008, elle devait traiter 227 kilos d’ordures ménagères résiduelles, les poubelles grises, par habitant et par an, aujourd’hui, elle est à 132 kg/habitant. Car elle a préféré une politique de stratégie Zéro déchets plutôt qu’un CSR. A Montpellier, nous étions à 260kg/habitant en 2008 et ce chiffre est toujours le même en 2024. Avec cette politique, nous aurions aujourd’hui 65 000 tonnes de déchets en moins et nous aurions économisé plus de 16 millions pa an”.

 “Quand aurons-nous des infos sur les effets sanitaires ?”

Autre problème mis en exergue lors de ce conseil, l’impact sanitaire de ce projet. Alors que les riverains de Garosud demandent une étude depuis décembre 2024“la question sanitaire n’a toujours pas été abordée, regrette Florence Braud, vice-présidente déléguée à la santé. J’aimerai entendre des spécialistes et des scientifiques sur ces questions, et pas seulement des industriels. Quand aurons-nous des infos sur les effets sanitaires et les effets cumulés de ce projet ?” 

Car la question des fumées rejetées se pose, et il s’agirait d’être “cohérent avec la politique globale du territoire, notamment sur la qualité de l’air”, a ajouté Jean-Noël Fourcade, conseiller métropolitain. Pour l’élu lattois, les deux autres objectifs de ce projet de CSR ne sont pas remplis, “la taxe des ordures ménagère ne baissera pas vu le niveau d’investissement requis et nous continuerons à devoir exporter nos déchets”.

“Nous laissons un industriel avoir la mainmise sur la gestion de nos déchets”

Enfin, ce qui pose problème à nombre d’élus d’opposition est la délégation de service publique (DSP). “Nous laissons un industriel avoir la mainmise sur la gestion stratégique de nos déchets, résume Alenka Doulain. C’est un verrou pour notre territoire car il va falloir ‘nourrir le monstre’ pour produire de l’énergie et pour permettre au délégataire de respecter son plan de financement”“Aujourd’hui, on est contraint de faire un marché de DSP”, répond René Revol qui admet être plutôt favorable à une régie publique.

Le 16 juillet prochain, les élus se retrouveront à nouveau dans l’hémicycle. Cette fois, ils devront voter le renouvellement de la délégation de service public pour la création de cet incinérateur. Selon René Revol, la loi oblige à une consultation citoyenne d’ici début 2026, “ensuite une enquête publique rendra ses conclusions et le préfet signera un arrêté s’il est convaincu”

En plus, toujours selon le maire de Grabels, après les élections municipales de mars 2026, “si la nouvelle assemblée veut annuler ce marché, elle en aura le droit. L’affaire n’est pas finie”. D’autant que même les citoyens qui rendaient aujourd’hui leur bilan sur la gestion des déchets n’ont pu trancher sur la question du CSR : “Notre avis ne peut pas en l’état être donné, écrivent-ils, tant que des précisions ne seront pas apportées sur le contenu du cahier des charges” donné au prestataire. En effet, “l’affaire n’est pas finie”.