Déchets : à Montpellier, les écolos en guerre contre le CSR

LA MARSEILLAISE / 19 MAI 2025

Rémy COUGNENC

La possible construction en ville d’une usine de Combustibles solides de récupération (CSR) est qualifiée de « bombe à retardement sanitaire, environnementale et financière ».

Les écologistes frondeurs de Montpellier n’en ont pas fini avec les déchets. Un sujet brûlant qui devrait animer la campagne des élections municipales.

En avril 2024, en choisissant de bifurquer vers la filière CSR, le président Michaël Delafosse (PS) avait déjà poussé vers la sortie l’ancien vice-président écolo François Vasquez, viscéralement opposé à l’idée de construire «en pleine ville, à 300mètres des habitations et de quartiers populaires» un «incinérateur à plastiques»Il s’agit du Combustible solide de récupération (CSR) :une technique industrielle innovante mais jugée «antinomique» à la politique de réduction des déchets (stratégie zéro déchets) votée à l’unanimité par le conseil de Métropole en 2022. À l’approche d’un nouveau vote en juillet qui pourrait lancer la délégation de service public, les écologistes partent en guerre contre ce projet de la Métropole.

Dans les prochaines semaines, les opposants promettent de mener tambour battant une campagne d’information sur les dangers de l’usine auprès des citoyens, associations, élus mais aussi en mobilisant la communauté scientifique.«Vous ne trouverez aucun médecin qui vous dira que tout va bien avec cette bombe à retardement dans le quartier des Grisettes», promet l’élue Coralie Mantion. Laquelle craint que les conclusions du conseil citoyen installé par M. Delafosse soient «enterrées comme les cahiers de doléances des gilets jaunes».

Un « effet cocktail »

De son côté le député héraultais Jean-Louis Roumégas s’active au Palais Bourbon. Il vient de poser une question au gouvernement sur le CSR et réclame un moratoire national. Évoquant un «triple non-sens sanitaire, écologique et financier», il insiste sur les risques pour l’Homme. Parce que l’usine ne brûlerait les déchets qu’à 800 degrés au lieu des 1 300 requis pour éliminer les polluants éternels (Pfas), J.-L. Roumégas l’assure : «Un incinérateur est une usine à fabriquer des polluantsAvec la combustion, des tas de dioxines, furanes, métaux lourds, Pfas [récemment interdits pour l’alimentation et les vêtements, Ndlr.] vont être disséminés dans l’air, puis se retrouver dans l’eau et notre alimentation. Un véritable effet cocktail», alerte-t-il.

Quant aux filtres de dernière génération utilisés dans ce type d’usine, ils ne retiendraient que les particules PM10 et PM2,5. «Là on parle de microparticules qui ne sont même pas mesurées par les normes et très nocives pour la santé», assure le député, renvoyant aux alertes de scientifiques dont les professeurs Thomas Bourdel ou Charles Sultan au sujet des effets des perturbateurs endocriniens. Risques de cancers, maladies cardio-respiratoires, AVC… seraient ainsi accrus. «Ce sont des dérivés pétroliers que l’on brûle, une énergie sale non renouvelable. Il est prouvé que les particules ultrafines traversent la barrière des poumons pour se retrouver au niveau du fœtus, du cerveau, du cœur», insiste François Vasquez.

Pour l’ex-vice-président qui rappelle que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères a été augmentée deux fois ces dernières années, le choix du CSR est aussi un «gouffre financier» pour la Métropole, endettée par le tramway. Si aucun chiffre officiel n’a été donné, l’opposant estime le coût de l’usine à «au moins 200millions d’euros, voire 300», sans compter les frais de fonctionnement. Pour un résultat que F. Vasquez prédit inefficace. «On va exporter autant de déchets qu’avant et payer pour les brûler.»

Tandis que la régie publique de l’eau éclabousse de son succès, J.-L. Roumégas ne comprend pas le choix de confier aux industriels les déchets et par la même occasion de relancer l’usine de méthanisation Ametyst en tant qu’usine «industrielle de tri mécano-biologique», alors qu’avec un meilleur tri des biodéchets à la source elle pourrait produire du compost. «Le soutien de René Revol [LFI] aux multinationales est incompréhensible.» Le nouveau vice-président en charge des déchets a annoncé qu’il défendra ses arguments avant le vote.