Nous demandons la réévaluation du projet de Contournement Ouest de Montpellier

Courrier adressé à la Première Ministre, au Ministre des Transports et au Ministre de la Transition Écologique

Objet : Demande de révision du projet de Contournement Ouest de Montpellier (COM)

Madame la Première Ministre, Messieurs les Ministres,

Vous êtes probablement déjà informés sur le projet de COM cité en objet, liaison à caractère autoroutier entre l’A750 et l’A709 traversant du nord au sud l’ouest de Montpellier et Saint-Jean-de-Védas. L’emprise au sol prévue par la DREAL pour ce projet irait jusqu’à 8 voies plus 2 bandes d’arrêt d’urgence. Ce projet a fait l’objet d’une DUP signée en septembre 2021. En janvier 2022, un avenant à la concession autoroutière de Vinci-ASF devait financer la construction et l’exploitation des ouvrages mais celui-ci a été invalidé le 27 janvier 2023 par le Conseil d’État.

L’objectif affiché de ce réaménagement de la route actuelle en tronçon d’autoroute d’environ 6 km est double : relier l’A750 à l’A9 (via l’A709) et fluidifier le trafic sur l’ouest de Montpellier. Le début des travaux est prévu en 2025-2026 pour une livraison en 2029-2030.

L’Utilité Publique du projet présenté a reposé essentiellement sur des gains de temps pour les usagers des itinéraires passant par le COM à hauteur de 3,5 %, soit quelques minutes à peine, sur la base de résultats entachés d’une large fourchette d’incertitude.

Il est démontré que les automobilistes réinvestissent les gains de temps, liés à la vitesse, dans l’allongement des distances parcourues. Et ces trajets allongés entraînent à la fois croissance des consommations énergétiques, émissions de GES, et étalement urbain. Or, les gains de temps supposés permis par le COM, déjà très limités, ne prennent en compte ni le trafic induit, ni l’étalement urbain induit, qui sont absents dans l’analyse socio-économique. Les prendre en compte déconstruit tout l’édifice de valorisation économique du projet.

De plus, ce projet cache un effet rebond très préoccupant : un report de trafic de poids lourds et un report des bouchons sur l’autoroute urbaine A7091. Les deux objectifs du COM (fluidification + liaison autoroutière) sont donc incompatibles.

La Déclaration d’Utilité Publique est également fragilisée par l’absence de prise en compte effective des réserves du commissaire enquêteur, pourtant essentielles :

  • La présentation d’une étude pour une alternative du projet limitée à 70 km/h. Aucune réponse n’a été rendue publique à ce jour.
  • La garantie du financement du projet.

Par ailleurs, si la démonstration de l’utilité du projet est sujette à caution, l’enquête publique a permis de mettre en évidence les impacts incontestables du projet de COM sur l’environnement :

  • Destruction et imperméabilisation des sols, dont 24 ha de très bonnes terres agricoles.
  • Destruction d’habitats d’espèces protégées, ou menacées.
  • Destruction de végétation remarquable dont 6 ha de boisements classés.
  • Dégradation de la qualité de l’air avec augmentation des concentrations en particules fines et de dioxyde d’azote (NO2), apparemment sous-évaluée.
  • Augmentation des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES), liée en particulier au transit accru de poids-lourds, et à l’urbanisation induite.
  • Altération de paysages remarquables et d’un tronçon de la Ceinture Verte de la grande ville, espace essentiel de respiration à préserver, et le cloisonnement renforcé du territoire avec ses ruptures de continuité écologique conduisant à une régression de la biodiversité.
  • Risque accrus d’inondation par entraves additionnelles à la circulation des eaux.

Ces raisons nous amènent, en tant qu’élu-es écologistes, à affirmer que le projet de COM présenté n’est pas en mesure de réduire durablement les congestions routières, bien au contraire, et qu’il aura un impact négatif sur la métropole de Montpellier. Ce projet des années 1995 est dépassé car il a été pensé uniquement “voitures ». Il ne prend pas en compte que la ligne 5 de tramway arrivant en 2025, de nombreuses personnes à l’ouest pourront se déplacer en tram plutôt qu’en voiture. De même, l’arrivée très prochaine de la gratuité des transports, des pistes cyclables, des bustrams, de la ZFE, vont reporter les automobilistes vers d’autres modes de transport plus respectueux de l’environnement. On peut même penser à la réalisation d’une étoile ferroviaire autour de Montpellier pour les plus grandes distances.

Miser sur le tout voiture dans un contexte social complexe (inflation, ZFE à venir, dépendance à la voiture et ses coûts) peut mener à terme à une situation explosive. La contestation du projet, déjà présente lors de l’enquête publique (> 40% d’avis opposés au projet), augmente chaque jour, au fur et à mesure que la population découvre le projet (selon un sondage commandité par VINCI, seulement 35% de sondés déclarent connaître le projet) et ses effets rebonds.

De plus, le Haut Conseil pour le Climat (HCC) vous enjoint aujourd’hui dans son dernier rapport « d’acter l’urgence et engager les moyens nécessaires au rehaussement de l’action pour l’adaptation et la décarbonation en France, en Europe, et à l’international ». Ce projet automobile de contournement ouest de Montpellier serait en totale contradiction avec les recommandations du HCC.

1 L’autoroute urbaine A709, traversant Montpellier sur 12 km, voit son trafic progresser depuis le dédoublement de l’A9 achevé en 2017. Les congestions y réapparaissent déjà aux heures de pointe, et mettent en évidence les effets du trafic et de l’étalement urbain induits. Le dédoublement de l’A9 avait pour objectif, à la fois de réduire les congestions de l’A709, et aussi de détourner le trafic de transit, notamment celui des poids-lourds. Le trafic venant du COM, viendra très vite aggraver les encombrements et les risques d’accident notamment liés au retour des gros véhicules en transit.

Notre groupe d’élu-es demandent que le projet du COM soit réévalué au regard des enjeux climatiques, sociaux, et environnementaux actuels et pour anticiper les besoins en mobilités sur le long terme. Sur l’itinéraire actuel, le trafic de transit est aujourd’hui inférieur à 10% et reste stable, et les congestions routières concernent essentiellement le trafic local. Par conséquent les solutions passent par une fluidification du trafic (ralentisseurs dans les giratoires), le développement des transports collectifs et le report modal, ce qui permettrait le rattrapage des retards gigantesques en matière de transport en commun maillant le périurbain et l’aire d’attractivité de Montpellier.

Un autre projet centré sur le report modal vers les transports en commun (avec voies réservées), ainsi que vers des pistes cyclables, des voies réservées pour le covoiturage en utilisant des dispositifs d’intermodalité performants et multifonctionnels, est possible. Avec des voies réservées pour les transports en commun et le covoiturage sur des emprises existantes.

Il est impossible par contre de favoriser l’intermodalité en construisant de nouvelles routes plus capacitaires : plus on construit de routes, plus celles-ci amènent de nouvelles voitures/camions qui ne passaient pas par-là auparavant. De mauvais choix seraient très lourds de conséquences pour la métropole de Montpellier.

Nous avons encore le temps, les travaux n’ont pas commencé.

Vous remerciant de l’attention que vous porterez à notre demande, veuillez agréer, Madame la Première Ministre, Messieurs les Ministres, l’expression de notre très haute considération.

Les élu-es écologistes de Montpellier